Téo, ton histoire…

Nous sommes le 12 septembre 2012… Nous fêtons nos 7 ans, comme cadeau, nous décidons de faire un petit nous … Quoi de plus beau ???

Hélas, tu te fais attendre, même désirer. Nous sommes obligés de passer pas les services d’Aide Médicale à la Procréation. Ce parcours commence en Avril 2014. Echographie, prises de sang, spermogramme et spermoculture… Toute une série d’examens s’organise autour de nous. Puis suivent les injections d’hormones pour stimuler les ovaires.

Les mois passent, et les échecs se succèdent, quant au mois de septembre, j’ai ce sentiment d’être enceinte … pourquoi ce mois-là, et pas un autre ??

Le 29 septembre, je me décide : je vais à la pharmacie chercher un test de grossesse urinaire, qui se révèle négatif, encore un échec !

Mais le 30 septembre toujours pas de règles, je décide donc de me faire prescrire au travail un bilan sanguin. Je le fais directement, je travaille dans un hôpital, donc je peux demander à une infirmière de me piquer tout de suite.

2h passent, je vais au laboratoire chercher le résultat sans ambitions, je m’attends à avoir ce résultat habituel : <5 ui/ml ! Quand j’ouvre l’enveloppe, surprise :

Dosage Beta HCG = 37 ui/ml, un résultat qui est faible, mais positif quand même.

Mon cœur bat à mille à l’heure, devant cet ascenseur qui me ramène dans le service, j’ai envie de hurler de joie ….

J’ai envie d’appeler ton papa pour lui annoncer la bonne nouvelle. Mais je préfère attendre le soir pour voir sa réaction.

En sortant du travail, je vais dans un magasin de vêtements et là j’achète un ensemble pour l’anniversaire de mon filleul et des petits chaussons gris, écrit dessus

MUM + DAD = ME.

L’après midi se passe ; je dois tenir ma langue auprès des personnes que je vois.

18h30 : ton Papa rentre du travail, je lui montre les vêtements que j’ai achetés pour mon filleul, et lui dis que je lui ai acheté quelque chose aussi. Là il me répond : Encore ? Je lui mets alors les petits chaussons entre ses bras : Quelques secondes se passent pour qu’il comprenne et me dise « C’est vrai? » Il me prend dans ses bras, C’est le début d’une belle histoire

Je lui indique tout de même qu’il faut quand même confirmer avec un second bilan sanguin 48h plus tard …

Les 48h se passent, nous sommes tout excités, second résultat du bilan sanguin 122ui/ml, il s’agit bien d’une grossesse évolutive. Tu t’es bel et bien installé, là au creux de mon ventre …

Nous sommes heureux, plein d’étincelles d’amour, de bonheur et de joie scintillent dans nos yeux.

20 octobre : Dernière échographie au centre d’AMP, pour voir si tu es bien placé, et si ton petit cœur bat. La gynécologue nous dit, pour ne pas qu’on s’inquiète, que tu es peut être trop petit et que son appareil n’est peut-être pas assez sophistiqué pour entendre ton cœur, mais elle essaye quand même, quand soudain, le doux bruit de ton cœur se fait entendre… Tu es bien là mon amour … tu ne mesures que 62 mm mais je suis déjà dingue de toi. Je suis ravie, ton papa aussi.

22 octobre : échographie de datation chez le Gynécologue qui suivra ma grossesse. Nous entendons à nouveau ton minuscule cœur …

Prochain rendez-vous vers le 14 novembre : Tu es bien prévu pour le 18 juin. Tu commences à gigoter, on le voit à l’écran. Mais tu as tellement de place dans mon ventre que je ne le sens pas encore. Ton cœur bat en rythme. Nous sommes heureux.

La grossesse se poursuit, tu commences à prendre ta place, malgré mes 6kg perdus, je commence à m’arrondir tout doucement.

Un Samedi midi, tonton Guillaume est venu manger à la maison, et on lui demande s’il veut être ton parrain, il répond tout de suite OUI, il est super content.

Je ne suis pas malade. Tout se passe bien, mises à part quelques nausées le midi. Tout va bien.

Arrive l’échographie officielle du 1er trimestre, elle a lieu le 1er décembre.

Tu as bien grandi, et mesure 6,36cm de la tête au coccyx. Tu seras grand comme ton papa.

Ton petit cœur bat parfaitement.

Le gynécologue décèle un léger décollement, il m’arrête donc de travailler.

C’est parti pour une longue période de repos, comme il le dit si bien, un bébé c’est précieux, et toi mon amour tu l’es encore plus car on t’a désiré et attendu deux longues années. Donc pas de bêtises. Repos +++

Le même jour, nous demandons à Tata Karine, si elle veut bien être ta marraine : elle n’a même pas eu besoin de répondre … Elle a pleuré et nous avons tout de suite compris que cela voulait dire OUI

Au cours du mois de décembre, je me repose beaucoup, et suit mon traitement à la lettre.

Visite du 4ème mois, le 5 janvier 2015 : les saignements dus au décollement se sont stoppés. Tu as encore bien grandi. On le voit à l’échographie, mais on ne connaît pas ta taille exacte, c’est juste une échographie de contrôle.

Par contre, tu nous dévoiles que tu es un petit garçon, nous avions déjà ton petit prénom : tu t’appelleras Téo. Si tu avais été une fille, tu te serais prénommé Giulia

Le gynécologue me visite : Le col externe est ouvert à 1 doigt, mais selon lui, rien de grave, le col interne est bien fermé. Je suis toujours en arrêt de travail.

Je commence à cette même période à sentir de vrais coups et j’adore ca.

Le 7 janvier, j’envoie un message à ton papa en lui indiquant que j’ai très mal au ventre au réveil. Je lui dis de ne pas s’inquiéter. Je prends une douche, et me met dans le canapé après avoir pris deux spasfons. La douleur se passe. On n’ira pas à la maternité.

Les jours passent avec 1 contraction par ci, une autre par la, mais pas plus d’une par jour et pas tous les jours.

Quand le 20 janvier, ton papa rentre pour manger le midi, je lui dis que j’ai eu une nouvelle contraction dans la matinée donc je reste au calme l’après midi.

Il repart travailler, et là, commence une longue série de contractions. Je décide d’aller prendre un bain, et lui envoie un message pour le prévenir que quand il rentrera, on ira quand même à la maternité pour une visite de contrôle, cela ne nous coûte rien, nous serons rassurés.

19h15, Nous voilà partis vers la maternité. Arrivés là bas, on me demande de faire une analyse d’urine. La gynécologue de garde me visite sans rien dire, fait un prélèvement car je présente des pertes.

Puis retourne à son bureau : là elle attend que je me rhabille, et nous dit, qu’elle ne nous ment pas, la situation est critique : le col est ouvert, et la poche des eaux visible.

On passe dans la salle d’échographie pour faire une échographie de viabilité.

Toi tu es toujours là, mon ange, ton petit cœur bat parfaitement, je te sens bien bouger. Tu pèses selon l’estimation de l’échographe environ 314gr. Elle me place en salle de pré-travail, car pour elle, c’est une question d’heures. Je passe la nuit, accompagnée de ton papa dans cette salle.

Le lendemain matin, mercredi 21 janvier : le gynécologue qui me suit vient me voir, et appelle un chat, un chat : pour lui, c’est foutu pour la grossesse actuelle. Tu ne tiendras pas plus de quelques heures voire quelques jours. La poche des eaux est descendue dans le vagin, et le col est ouvert entre 6 et 7 cm. Et celui-ci nous indique aussi, que tu n’es pas assez mature, que tu ne pourras pas être pris en charge par les services de néonatalogie. Tu risquerais des séquelles cérébrales trop importantes.

Là c’est le monde qui s’écroule autour de nous. La terre s’ouvre en deux sous nos pieds. Nous t’avons voulu, désiré et attendu, tu ne peux pas partir maintenant. Pas aussi vite.

Je suis transférée dans la journée vers le Centre Hospitalier Régional et Universitaire. Là-bas, je suis suivie de près. Les Docteurs veulent tenter le tout pour le tout. On va essayer le cerclage. Mais il faut d’abord enrayer cette petite infection qui est visible dans mon sang. Celle-ci est faible mais présente. Nous savons déjà qu’elle ne vient pas des pertes que je présentais, car le résultat est revenu négatif. Mais d’où vient-elle ?

Je suis placée dans une chambre seule. Ton papa passe les nuits avec moi. Lorsque je suis arrivée dans le service, un gynécologue vient me faire une échographie, tu es les pieds en bas, engagé dans le col, je sens bien que tu bouges très bas. Il nous explique le cerclage, en nous indiquant que ce n’est pas un geste sans risque, car il faut repousser la poche des eaux. Mais dans tous les cas, si l’on ne tente rien, on te perdra. On est prêt à tout, on dit que l’on fera ce qu’il faut. A commencer par l’alitement total.

Je passe donc les journées qui suivent dans ce lit, sans poser un seul pied à terre. Ton papa est formidable et dévoué pour moi, pour toi, pour nous …

Chaque jour une nouvelle échographie, pour voir déjà ton petit cœur battre, et aussi, pour voir où tu es placé.

Jeudi 22 : tu te présentes la tête en bas, mais par chance tu es un peu remonté dans l’utérus : une lueur d’espoir… On va peut-être pouvoir aller jusqu’au cerclage. Mais l’infection est légèrement augmentée. Donc on doit encore attendre et rester au calme dans le lit.

Vendredi 23 janvier début d’AM : échographie du jour. Elle nous montre que tu es toujours la tête en bas, mais que tu es en train de t’engager. On ne perd pas espoir. Tu es remonté une fois, pourquoi pas une seconde fois ? En plus l’infection commence à baisser, les antibiotiques font effet. On tentera certainement le cerclage lundi. En attendant, toujours du repos !

Puis dans l’après-midi, quelques contractions se font sentir, il est environ 16h. Puis celles-ci se rapprochent très vite, et deviennent très douloureuses. Le Spasfon ne fait plus effet, les contractions ont pris le dessus.

Je sonne plusieurs fois pour appeler les sages-femmes, celles-ci sont dévouées et ont bien compris que ça n’allait pas.

17 – 18h les contractions font mal mon amour, j’ai peur de te perdre … Ton papa est présent et essaye de me réconforter pendant les contractions malgré son inquiétude. Il a mis du temps à t’aimer… mais maintenant qu’il t’aime, il tient beaucoup à toi.

Le gynécologue passe et me fait une échographie, tu es encore plus bas qu’en début d’après-midi, je souffre beaucoup, ils prennent donc la décision de me descendre en salle de travail et d’accouchement. Cette salle porte le numéro 7.

Ils essayent de se décider sur la façon de soulager ma douleur : Péridurale ? Morphine ? Rachianesthésie ?

Je souffre trop, dans un élan de détresse et de souffrance, je leur demande s’ils peuvent encore te sauver ? Si oui, que l’on fasse ce qu’il faut. Si non, je les supplie de me soulager.

Et là le couperet tombe : Je vais accoucher, on ne peut plus te sauver.

Tu vas naitre, mais tu es trop petit pour être pris en charge par les services de néonatalogie.

On me pose la rachianesthésie. Miracle, elle fait bien effet, après m’avoir piquée 5 fois, ils ont réussi à me la poser. Je suis soulagée, mais on n’envisage toujours pas de te perdre. Ton papa a les yeux plein de larmes. On nous pose plein de questions si on veut te reconnaitre, si l’on veut te donner un prénom, si l’on veut te voir, si l’on veut faire une autopsie … ?

C’est décidé, tu es notre fils et fait partie de notre vie à part entière. Tu as un prénom, et nous souhaitons que tu sois reconnu.

Quand la sag- femme m’examine, elle me dit : on va s’installer Madame, vous allez pousser, et votre bébé va naitre.

Comment je peux imaginer te mettre au monde aussi tôt en sachant que tu vas partir dès que tu seras sorti de mon ventre ?

Là ton papa m’aide et m’accompagne, tu es tellement petit que ta naissance se fait sans complication. Tu vois le jour à 20h35 ce vendredi 23 janvier 2015. Tu es formé comme un bébé « normal », tu as 10 petits doigts, 10 orteils (tu as même les pieds égyptiens comme ton papy), tu as de petites oreilles magnifiques, une petite bouche et un petit nez formidables. On a fait une petite chose merveilleuse : Toi mon trésor. Tu ne pèses malheureusement que 400gr pour environ 25 cm

La dame t’emmène dans une pièce à coté pour te préparer avant de te présenter à nous.

Elle t’apporte à nous, tu es toujours en vie, et tu le resteras 1h35. On te donne tout l’amour qu’il est possible de donner à son enfant. On te câline, t’embrasse et te parlons : « Tu ne connaîtras pas la jungle que nous te préparions dans ta chambre, tu ne connaîtras pas tes chiens… ». Des paroles qui font mal. On te contemple, tu es si beau, on ne saurait pas dire que tu vas partir dans quelques minutes …

Puis vient ton dernier battement de cœur, il est 22h. Voilà tu es parti mon amour … C’est tellement dur. Tellement injuste. Qu’avons-nous fait de mal ? Pourquoi nous ? Tant de questions, tant de remords.

Nous sommes en pleurs. Tu es arrivé puis parti beaucoup trop tôt.

Nous nous décidons à te rendre à la sage-femme. Je lui demande si je peux garder ton petit bonnet. Elle me dit que oui. Nous devons remonter dans notre chambre.

Il est 23h30, tes mamies et ton papy maternel sont toujours là. Ils ne voulaient pas partir sans nous témoigner leur soutien. Ils sont aussi en pleurs, leurs yeux sont rouges. Ils nous raccompagnent dans la chambre, nous embrassent, puis reprennent la route, ils ont une heure de trajet pour rentrer chez eux.

Nous voilà à 2, ton papa et moi, dans cette chambre. Les sages-femmes passent pour surveiller que je ne fasse pas d’hémorragie. On a du mal à trouver le sommeil. Pour ne pas dire on ne dort pas. Ton petit bonnet est posé sur mon cœur, et si je le perds par nuit, je me réveille en sursaut. Je me pose toujours autant de questions : pourquoi nous ? Qu’a-t-on fait de mal… ?

Le samedi, ton papy et ta mamie maternels viennent nous rendre visite, car même si tu n’es plus là, je dois rester en observation pour les suites de l’accouchement, voir si tout se passe bien. Même si cela n’a pas de valeur auprès des administrations, j’ai quand même accouché par voie basse.

Ils repartent vers 19h et là, on se sent à nouveau seuls, vides… Là, Je découvre une seule et jolie étoile qui brille juste devant la fenêtre de notre chambre ; je me dis que c’est toi. Tu nous envoies un signe pour nous dire que tu es bien, que tu ne souffres pas. On parle beaucoup avec ton papa, on ne veut pas que tu partes aux oubliettes, si tu as un frère un jour, il portera ton prénom en second. Et tu ne resteras pas l’enfant inconnu de tes frères et sœurs. Tu seras leur grand frère qui est parti dans les étoiles… on se pose beaucoup de questions qui sont toujours les mêmes : pourquoi nous …. ?

La nuit se passe, j’essaye de dormir un minimum, car c’est dur… Le sommeil est dur à trouver… Je pleure beaucoup.

Le dimanche matin, nous sommes sortants. La sage-femme nous revoit une fois, puis nous pose ces fameuses questions quant à ce que l’on veut pour ton devenir : te reconnaitre, t’organiser des obsèques, te laisser à l’hôpital en vue d’une crémation … Puis, la question que je lui pose : Peut-on te revoir ? Elle me dit oui. Elle va faire en sorte qu’on te revoit avant de partir.

Quand elle te ramène dans cette petite couverture bleue, tu es magnifique, ta peau est rose. Tu sembles paisible. On a l’impression que tu dors. On t’embrasse, te câline, te chérit autant qu’on le peut.

Je te dis que je t’aime, que je t’aimerais toute ma vie, que tu es et restera mon 1er bébé. Nous sommes le 25 janvier, je suis sortante de l’hôpital, on laisse là notre petit bébé. Sur la route, nous sommes silencieux, tant de questions nous trottent dans la tête, puis ce sentiment d’injustice qui nous envahit.

J’ai peur de rentrer à la maison, mais nous voilà bel et bien arrivés. Je découvre sur la table, laissés par ton tonton, des petits colis, des petites chaussures que nous t’avions commandées sur internet. Puis, nous montons dans la chambre, ou sont stockées toutes tes petites affaires. Nous éclatons en sanglots.

Je sors le pyjama que nous t’avions choisi pour ta naissance, puis le doudou, 1er chose que nous t’avions acheté avant même de savoir que tu étais un garçon. Beaucoup beaucoup de larmes. Nous prenons notre courage à deux mains, on va tout ranger. Les larmes coulent le long de nos visages, nous sommes si tristes, si accablés. Ton papa ranges tes affaires au grenier, nous les emballons bien pour ne pas qu’elles s’abiment, même si tu ne les mettras jamais, elles sont à toi mon ange. Et je n’arriverais pas à m’en séparer !

Tes papys et mamies viennent nous rendre visite pour nous soutenir un peu, leur présence nous fait du bien, mais lorsqu’ils s’en vont, nous sommes de nouveau en pleurs. Des minutes qui passent mais qui paraissent des heures !

On se rend le soir chez tata Kelly et tonton Stéphane, qui nous soutiennent beaucoup. On parle de toi, ils sont aussi très tristes de ne pas pouvoir te connaitre. La vie est injuste mon ange.

On rentre à la maison, cette maison est bien triste !

Lundi matin arrive, nous devons contacter la personne qui s’occupe de l’état civil, au niveau de l’hôpital, elle s’occupe en particulier des décès des petits, et tout petits ! Nous avons rendez-vous à 15h.

On prend la route en début d’après-midi. Nous ne voulons pas arriver en retard. Dans le bureau de ce Monsieur, nous décidons de te déclarer, ton papa signifie qu’il te reconnait. Tu porteras son Nom Téo. On prend aussi la décision de ne pas s’occuper de tes funérailles, c’est trop dur pour nous. Ces paroles horribles raisonnent dans ma tête, on t’abandonne là, tu partiras avec des dizaines d’autres petits anges.

Puis avant de repartir, nous demandons à te revoir. Tu es toujours aussi beau mon amour. Tu es aujourd’hui habillé. Des personnes de l’association confectionnent des vêtements pour les tout-petits. Car oui, tu es un tout petit. Tu ne pèses que 400gr. Nous te serrons à nouveau contre nos cœurs. Ton papa, te prend même dans ses bras, chose qu’il n’a pas osé faire la veille. Je suis heureuse, c’est paradoxal, de voir qu’il te prend dans ses bras, il n’aura pas de regrets, il t’embrasse même. J’en suis sure, il est un papa merveilleux.

Nous repartons les yeux plein de larmes et le cœur lourd. Cela devait être la dernière fois où nous te voyons.

La crémation aura lieu dans les 4 mois qui viennent, on nous informera de la date lorsque celle-ci sera définie.

Quand nous rentrons à la maison, Papy et mamie (maternels) viennent, car oui, nous sommes le 26 janvier, le jour de mes 26 ans. Quel anniversaire horrible. Mais mon plus beau cadeau a été de te serrer dans mes bras une dernière fois. Je ne voulais pas que l’on me souhaite mon anniversaire. Mais ce cadeau-là, et un cadeau inestimable, serrer son fils dans ses bras une dernière fois ! Une fois qu’ils sont partis, les larmes coulent à nouveau … Comme les jours qui suivent. Le sommeil se trouve assez facilement, j’ai du sang de marmotte dans les veines, mais le réveil est difficile, chaque matin je me réveille et je pleure. Je n’arrive pas à quitter ton bonnet. Il me suit partout. Je me réveille en sursaut si je ne le trouve pas.

Quand je me connecte sur le site de l’association qui s’occupera de la crémation, je découvre qu’une cérémonie aura lieu le 7 février. C’est dur, mais j’espère au fond de moi, que tu feras partie de cette crémation, car te savoir là-bas, dans ce frigo, pendant 4 mois… L’idée m’est insupportable. J’ai l’impression de t’avoir abandonné. Je contacte alors la dame qui s’occupe de l’association, celle-ci me pose quelques questions te concernant, ta date de naissance, ton poids, l’âge gestationnel … Selon les renseignements que je lui donne, elle me dit que tu feras bien partie de la prochaine crémation. Cela me soulage, mais me fait aussi terriblement mal !

Les jours passent, nous sommes fort entourés de nos familles, ils sont très présents pour nous, nous écoutent, découvrent ton histoire …

Je me mets dans l’idée que tu n’es plus là, mais l’idée de l’incinération me fait peur ! Le vendredi qui suit, tu as 1 semaine, 1 semaine que tu es né, mais aussi 1 semaine que tu nous as quitté. C’est une journée difficile. Le samedi matin, ça ne va pas, j’ai l’impression que je vais devenir folle, je bouillonne à l’intérieur. L’idée que tu vas être incinéré me hante, tu vas être mis dans ce cercueil avec tous ces autres enfants ! L’idée m’est insupportable. Je dois prendre quelque chose pour me détendre. Cela fait effet, mais je ne veux pas m’y habituer, j’en prends le moins possible.

Comme signe de ton passage sur cette terre, même si tu n’es resté qu’une heure trente-cinq minutes, nous avons choisi de nous faire tatouer ton prénom près de nos cœurs. Le mien est à l’intérieur de mon bras gauche, il s’agit d’un signe infini accompagné de ton prénom et d’une plume qui symbolise pour moi une plume d’aile d’ange… De tes ailes d’ange. Celui de ton papa a été rajouté à son tatouage qu’il avait déjà, il est identique au mien, mais légèrement plus à l’extérieur de son bras. Voilà, on t’a dans la peau, tu es et restera notre fils, Notre 1er enfant.

Le week-end passe. Nous recevons la famille, nous sommes invités. On est présent pour nous, et cela nous réchauffe le cœur. Mais c’est décidé, je veux te revoir. Tu me manques, j’ai le besoin, comme toutes les mamans de serrer mon enfant contre mon cœur. J’appelle donc le lundi matin, afin de savoir si cela est possible avant la crémation qui a lieu le vendredi qui arrive. Cela est bel et bien possible. Le rendez-vous est pris, nous te verrons une ultime fois ce mardi 3 février. Nous avons, le même jour, rendez-vous avec la psychologue. Celle-ci m’écoutera parler pendant une bonne demi-heure. Mais je suis impatiente devant elle et distraite, je regarde sans cesse l’heure, je sais que je vais te voir dans les minutes qui suivent.

Nous voilà devant la porte de la chambre mortuaire de l’hôpital. Tu es dans ce salon, celui qui porte le numéro 1. On entre et là, stupeur, tu n’es plus le magnifique petit bébé que nous avons quitté le 26 janvier. Ta peau s’est abimée avec ce froid. Tu es toujours notre bébé, mais nous avons du mal à te voir comme cela. Je te prends tout de même dans mes bras, je suis quand même ta maman, et j’ai besoin de te prendre. Je t’embrasse malgré ta peau froide et durcie par ce froid. Nous ne resterons pas longtemps avec toi car c’est difficile pour nous de te voir comme ça. Nous prenons néanmoins le temps de te laisser ton doudou avec lequel je dors depuis que je suis rentrée à la maison. On veut que tu partes avec, c’est le tien.

En sortant, on se dit être soulagés que la crémation ait lieu quelques jours plus tard, tu ne t’abimeras plus avec ce froid. Tu étais si beau lors de ta naissance, comment peut-on voir son fils aussi abimé par ce froid ?

Nous sommes allés commander des fleurs pour la cérémonie qui aura lieu le samedi suivant la crémation. Nous n’avons que cela à t’offrir là où tu vas reposer. En attendant ce jour, nous essayons de nous changer les idées. Même si tu en fais partie à chaque instant.

Nous voilà aujourd’hui Jeudi, tu es maintenant, selon la personne qui s’occupe de l’état civil, dans ce cercueil avec les autres petits anges. Mais tu es pour nous le plus beau de ces anges. Et c’est normal, tu es notre fils. Je m’imagine, et j’espère qu’ils t’ont laissé ton doudou contre toi comme je te l’avais mis. Puis, j’ai hâte d’être à samedi, pour que cette mauvaise journée soit passée, celle où tu ne seras plus présent physiquement dans nos vies. Tu seras des souvenirs, sur une photo… et tu seras toujours dans nos cœurs.

Arrive le samedi, nous sommes prêts de bon heure ; nous avons environ 45 minutes de route pour aller jusqu’au crématorium. Sur la route, personne ne parle dans la voiture. Nous arrivons à H., une boule d’angoisse se forme dans ma gorge, comment imaginer, que nous sommes à la cérémonie d’adieu en l’honneur de notre petit ange.

La cérémonie débute, elle n’est pas trop longue ; juste ce qu’il faut. Les textes et chansons choisies sont magnifiques, très bien adaptés à la situation. La chanson de Lynda Lemay : « Pas de mots » me touche beaucoup, puis celle de Jean-Louis Aubert : « Aimer ce qui s’enfuit » aussi. Le papa d’un petit ange prénommé Mélyne prend la parole pour lire quelques phrases, il y a beaucoup d’émotions dans sa voix. Moi je n’ai pas réussi à t’écrire de poème, sans doute car je n’ai pas assez d’inspiration… Vous êtes 35 petits Anges à avoir quitté ce monde. 35 petites bougies allumées en votre honneur.

Une fois la cérémonie terminée, nous nous rendons à la stèle des tout petits, qui se situe au niveau du jardin des souvenirs. Une jolie stèle avec un cœur et un ange où nous déposons, Tes grands parents, ton parrain et nous les fleurs que nous t’avons offertes.

Puis nous reprenons la route pour rentrer chez nous. C’est bête à dire, et certaines personnes ne comprendront peut être pas cela, mais nous sommes soulagés que ce soit passé. Soulagés de savoir que tu es été traité et honoré comme un humain, et non comme un « fœtus ».

Voila ton histoire mon amour, celle-ci avait pourtant bien commencé. Nous sommes maintenant parents, mais pas comme nous l’avions imaginé. Nous sommes Par ’ange. Nos rêves et nos projets se sont envolés avec toi. Nous savons que tu es à nos côtés, mais pas physiquement.

Je te dis au revoir mon bébé, mais pas adieu, car on se retrouvera un jour, pour ne plus jamais se quitter.

On t’aime notre petit Ange Téo

Stéphanie et Samuel