Nina

Je m’appelle Salomé, j’ai 25 ans. Le 12 janvier 2015, ma vie a changé à tout jamais. Au mois de juillet 2014, j’ai appris que j’étais à nouveau enceinte après une fausse couche le 1er mai 2013. Cette épreuve fut si difficile à surmonter et pourtant… Le désir d’être maman a été plus fort que tout! Alors vous imaginez ma joie et ma réserve lorsque j’ai appris ma deuxième grossesse. Une immense surprise que j’attendais depuis un an mélangé à une peur de revivre cette douloureuse épreuve. Mais le temps a avancé , tout le monde éprouvait une confiance certaine en me disant “ça fait 5 mois maintenant, ne t’inquiète plus!!”. Les médecins, sage femmes, l’entourage, moi même… Ayant du diabète de grossesse, j’ai passé 7 mois à faire extrêmement attention à mon alimentation (peut être trop attention parfois). J’ai perdu 8 kilos, je gérais comme une reine. Une privation qui m’exaspérait parfois et me rendait si fière à la fois. Je me plaisais à répéter “si avec tout ce que je fais, elle a des problèmes, moi j’y comprend plus rien!”. Oui, elle, une fille. Une princesse, tant attendu. Par nous d’abord, nos familles et nos amis ! Elle s’appellera Nina. Son papa fabrique son berceau en forme de lune. On me demande ce que je désire qu’on lui offre pour Noël. Rien!! Elle doit arriver en mars. Déjà que nous, parents, nous n’osons pas faire d’achats… et puis on ne fait pas de cadeau à quelqu’un qui n’est pas encore là. On l’a rien qu’a nous pendant 9 mois (surtout rien qu’à moi). Alors les autres et leurs cadeaux, ils attendront ! Jeudi 8 janvier, premier craquage de ma part. Un petit pyjama. Même si cela fait quelques jours qu’elle ne bouge plus trop alors, qu’elle gigotait tant ! Vendredi, aucun mouvement, 7 mois, peut être qu’elle n’a plus trop de place… Grosses angoisses, on essaye de la stimuler en lui faisant écouter de la musique comme souvent . Rien. “Peut être qu’elle est fatiguée”. Je me réveille dans la nuit, je pleure, je me sens vide, plus de tonicité dans le ventre. Mais peut être que là, c’est moi qui divague, je suis fatiguée. Je me rendors. Le lendemain matin, je pleure à nouveau et je décide de me rendre à l’hôpital. Avec ma maman. Le papa avait une obligation et puis on ne pensait pas à ce qu’il allait arriver. Enfin on essayait de ne pas y penser… Une demie heure de route. Tout se mélange, je plaisante pour ne pas penser, ma maman est fermée. Le long couloir de la maternité, prise en charge rapide. La sage femme branche le monitoring, “parfois on ne trouve pas le cœur tout de suite”. “On va changer de salle, cet appareil est défectueux”. Tu m’as bien vu? Tu crois que je n’ai pas compris? Échographie, le gynécologue se place au niveau du cœur. Aucun son… “qu’est ce qu’il se passe?”. Ma maman fond en larmes. Il me regarde, me prend la main. “Non… non… non” “ne me dites pas ça”. “Si mademoiselle…” “NON, jamais je me relèverai, pourquoi? Faut que j’appelle le papa.” “Ça va ma chérie? Alors?” “Mimi… on a perdu la petite….” L’amour de ma vie, le père de ma fille, celui qui m’a écouté hurler ma douleur et passé la sienne sous silence. Cette homme qui a eu le courage d’être là toute la journée de l’accouchement et de tenir ma main. Ce père meurtri de douleur qui a trouvé la force de me porter alors que sa douleur était identique à la mienne. Je dois accoucher de ma fille sans vie le 12 janvier. J’ai toujours trouvé que la vie était belle, là je la trouve moche, cruelle. Personne ne comprend. Je n’aurai pas des enfants de substitution mais Nina aura des frères et sœurs. Je ne veux pas oublier, il s’agit de ma fille. Laissez moi en parler, laissez moi pleurer, laissez moi dire que la vie c’est de la merde. On n’est pas fait pour perdre son bébé. Alors oui j’avance. On se doit de se battre pour elle. Parce que je suis certaine que Dieu n’existe pas, pour nous infliger tout ça, mais elle, elle est à côté de moi. Et elle veut que je sois heureuse. Je le serai mais avec toujours dans le cœur un vide immense. Nina, si tu me vois, je pleure, ton absence est insupportable mais je vais me battre mon ange. Je t’aime tellement. Tu auras connu une seule chose, la plus importante : l’amour qu’on te porte. 7 mois de bonheur malgré tout, tu nous as tant apporté. Ce fut 7 mois de projets, d’amour. Sylvain. La force de l’amour, la fusion de nos deux personnalités, la puissance de nos sentiments nous aident à avancer. Parce que sans toi, je n’aurai pas fait tout ce chemin. On n’acceptera jamais, nous allons vivre avec…