Doryan, mon petit cadeau

Interruption médicale de grossesse a 28 SA +4J

Bonjour,

je m’appelle Sandrine, j’ai 25 ans, je vis en région parisienne.

Je suis tombée enceinte en avril. C’était mon premier bébé. Un bébé pour lequel on a pris notre temps avant de le mettre en route (7 ans d’amour). On voulait être sur que toutes les “conditions” idéales soient réunis pour l’accueillir. On le voulait tellement.

Lors de la deuxième écho à 22SA le Dr nous dit qu’il y a un problème à la vessie et au niveau des reins. En fait le système urinaire est bouché au niveau de l’urètre ce qui a enflammé les reins et faisait contracté la vessie.

Après plusieurs semaines d’échos, d’examens en tout genre (ponction de sang fœtale, IRM, etc ….), le verdict tombe. Le bouchon est levé mais les Dr ont diagnostiqué que les reins ont été sévèrement touchés et qu’il y a un grand risque d’insuffisance rénale et que la vessie ne se contracte plus. En clair, insuffisance rénale + incontinence à vie.
On ne voulait et ne pouvait faire subir ça à notre petit bout. (voir post sur le forum “santé” “problème de vessie sur le bébé”)

La décision est prise, il faut interrompre la grossesse. LA décision la plus difficile de notre vie.

J’ai été hospitalisée le lundi matin. A peine arrivée, direction les salles de naissances pour me poser la péridurale que j’aurai en continu jusqu’à la fin de l’accouchement puis ils font ce qu’ils appellent le geste de fin de vie in-utero. C’est le même geste que pour une ponction de sang foetale ou une amnio. Une grande aiguille dans mon ventre qui injecte d’abord un anesthésiant pour l’endormir puis en deuxième un médicament qui arrête le cœur 5 min avant “le geste ” je le sens encore bouger en moi.

Le choc a été brutal, caché derrière des champs stérile pour que nous ne voyons pas “le geste”, je m’effondre quand ma sage-femme me dit ça y est c’est fini. Mon cœur éclate en mille morceaux et mon conjoint est aussi abattu que moi.
Après 20 min , on me fait un contrôle écho pour être sur que tout est vraiment fini.
J’avais encore l’impression de le sentir bouger, je me refusait de me dire qu’il est mort en moi.

Peu après on m’administre les médicaments pour déclencher l’accouchement, les contractions. Je retourne dans ma chambre vers 15h, il faut attendre. Je veux en finir au plus vite mais malheureusement mère nature joue encore avec mes nerfs. Fin de soirée toujours rien, je passe la nuit à me réveiller toutes les heures de peur de perdre les eaux dans mon lit et de ne pas le sentir. Et au petit matin toujours rien pas de contraction.
La sage femme m’ausculte à 8h et me dit qu’on va me percer la poche des eaux.
Trente minutes plus tard je retourne en salle de naissance, la même qu’hier, où le cœur de mon petit ange a cessé de battre. On me perce la poche des eaux et là les contractions arrivent. Le temps passe à une vitesse folle.
Arrive le moment où on me dit de pousser et là je n’y arrive pas, je fonds en larmes, je n’ai pas le courage de l’expulser. Je veux qu’il reste avec moi. C’était horrible je le sentais glisser de moi. A la fin j’ai été obligée de pousser je n’en pouvais plus, je poussais en pleurant et en criant ma colère.
Ca y est c’est fini, il n’est plus là. Il est 12h25

Mon chéri s’effondre sur moi, on essaie de se consoler l’un et l’autre mais la peine est tellement intense que c’est impossible. Je me sens vide, creuse et inutile.

Au début je ne voulais pas le voir, peur de voir l’image d’un bébé mort, l’image de quelque chose d’horrible qui me traumatiserait. Mais dans la nuit je craque et change d’avis j’ai le sentiment qu’on me l’a volé, arraché.
Ma sage femme m’emmène le voir et la je fonds devant ce petit être magnifique. Tellement paisible, on avait l’impression qu’il dormait. Soulagement, je passe une bonne heure avec lui, à le contempler, le toucher, le regarder sans rien dire. Puis je lui dis au revoir. Je le laisse partir, on ne me l’a pas pris, c’est moi qui l’ai laissé s’en aller.

Je suis rentrée hier de l’hôpital, je ne culpabilise presque plus déjà mais j’ai ce sentiment d’injustice. Pourquoi? Pourquoi nous? Des questions sans réponse malheureusement.

Je sais que la douleur passera avec le temps, mais mon petit Doryan me manque terriblement, quand je l’ai vu j’en suis tombé amoureuse. Je n’ai quasi rien vécu avec lui et pourtant je l’aime de tout mon cœur.

J’espère que mon témoignage servira à l’une d’entre nous qui aura perdu son ange dans des circonstances similaires.

Merci d’avoir pris le temps de me lire.

Novembre 2008